Gaspard Leva écrit à son ami Jonquer (Bettincourt – Pologne)

Le 7 décembre 1806, LEVA Gaspard, cultivateur à Bettincourt, soldat dans la 1ère Compagnie du 1er Bataillon Principal Train d’Artillerie du 3ème Corps de la Grande Armée de Pologne, écrit de Varsovie à son ami JONQUER:

 » A monsieur Jonquer

Mon très cher ami,

La présente est pour m’informer de l’état de votre santé; à l’égard de la mienne elle est très bonne, Dieu merci. Je souhaite que la présente vous trouve de même. Mon très cher ami voilà la troisième que j’ai l’honneur de vous écrire sans avoir de vos nouvelles. C’est ce qui me fait beaucoup de peine, je ne sais à quoi attribuer cela. Je ne sais pas si c’est que les lettres ne vous parviennent pas, je ne pas encore reçu de vos nouvelles depuis que je suis parti de Compiègne, et je suis parti pour aller chercher des chevaux de remonte dans nos endroits et étant à Marche-en-Famenne, j’ai demandé la permission  pour aller faire un tour au pays de mes chefs, et ils n’ont pas voulu me la donner vu qu’il y avait trop loin et qu’il fallait partir de suite. Quand je vis cela, je vous ai écrit de Marche dont je n’ai pas reçu de réponse, et nous sommes partis tranquilles comme Baptiste rejoindre l’armée.

Mon cher ami je vous dirai que voilà bien du chemin que nous faisons depuis ces temps-là. Nous avons commencé par les Autrichiens et nous avons passé à Vienne ville Capitale de l’Autriche sans beaucoup de peine, mais nous avons eu une bataille a cinquante lieues de Vienne qui est la bataille d’Austerlitz qui était une bataille sanglante et nous sommes revenus au cantonnement dans la Bavière pendant six mois, et nous étions très bien, et nous ne pensions pas avoir la guerre avec les Prussiens, mais l’on nous a trompé, et nous sommes partis de la Bavière le 26 de septembre pour nous battre avec les Prussiens, et nous ne les avons pas rencontrés que le 14 octobre que nous avons eu une bataille assez sanglante (le 14 octobre 1806, ont eu lieu simultanément la bataille d’Iéna et la bataille d’Auerstedt), mais notre compagnie a eu du bonheur nous n’avons perdu personne, Dieu merci, mais notre Corps d’Armée a très souffert nous avons des régiments qui ont perdu considérablement de morts et après, nous avons marché sur la ville Capitale de la Prusse qui est Berlin, et nous y sommes entrés sans tirer un coup de fusil, et nous sommes actuellement à la ville Capitale de la Pologne dont il y a une très grand rivière (la Vistule) et le Prussien et le Russien n’avait eu que le temps de couper le pont, et il gardait le côté du pont, et nous gardions l’autre, mais nous les avons fait évacuer et nous attendons que le pont soit raccommodé pour passer et nous avons deux Corps d’Armée qui les ont pris par derrière et ils sont bloqués à l’environ de cinquante mille tant Russes que Prussiens et les Prussiens se rendent tous les jours. Voilà cher ami ce que je peux vous apprendre pour le présent de la guerre.

Je vous prie d’assurer bien de mes respects à monsieur MATTELAUT Henri ainsi qu’à sa femme et ses enfants, mon très cher MATTELAUT Henri je vous prie de me faire part de l’adresse de mes deux frères LEVA Gilles-Joseph et LEVA Robert, si vous les savez parce que l’on m’a dit que l’île de Saint-Domingue était rendue. Je vous prie de me faire passer un certificat de currele (?) et je vous prie de faire réponse de suite. Je vous prie de faire mes compliments à BOCQ Biéthé (?) et que je le salue en écrivant la lettre le verre à la main, bien des compliments à ma belle-soeur, à Marie, ainsi qu’à mon neveu LEVA (?) Lambert, ainsi qu’à tous les amis de la boutique MATHELOT Henri. Et si je vous prie de me donner des nouvelles du pays, si les jeunes gens partent. Je vous dirai que j’ai vu la femme de LELARGE Arnold et je n’ai pas vu son homme; il est dans la 5ème Compagnie du 3ème Bataillon Bis.

Le finis en vous embrassant de tout mon cœur et je suis pour la vie votre ami. »

Violent accrochage à Lamine

Le 16 juin 1944, deux Résistants du « Groupe Zoro », NAFTALI Alter, dit « Bob II », (de confession juive) et LONGREE Georges, dit « André », se rendent à Fize à vélo pour y récupérer une moto et des armes. A leur retour, ils sont interpellés par une patrouille de trois feldgendarmes de Waremme, pour un banal contrôle d’identité, dans la campagne de Momale, près de la Tombe de Hodeige. Constatant qu’ils sont armés, les Allemands leur passent les menottes et les emmènent « manu militari », vers le poste d’observation aérien allemands, installé au Moulin de Pousset.

Ayant appris cette arrestation, vers 15h20, le chef du groupe « Zoro » de Lamine, ROBYNS Zénon, dit « Ric », et ses compagnons, dont MOËS Julien, KAEPEN Alphonse, décident de libérer les deux hommes, sans attendre les ordres de DERWA Arthur. Ils se postent sur la motte castrale près de l’église de Lamine et derrière le mur d’enceinte du cimetière, pour intercepter les Allemands.

Ayant également été avertis, quelques Résistants du Groupe « Zoro » de Hodeige:

  • LEONARD Georges, dit « Le Vieux Georges »
  • FRANKINET Laurent, dit « Pierrot »
  • LITTLE Henry, dit « Jim »
  • DOSSERAY Sébastien, dit « Freddy »

se postent en embuscade derrière la haie de la prairie, située en face de la ferme VANDENSAVEL à Lamine, à une encablure des Résistants de Lamine, cachés près de l’église et du cimetière.

Ces deux groupes veulent intercepter les Allemands qui retiennent prisonniers deux des leurs . Chacun des groupes ignore la présence de l’autre.

A l’arrivée de la patrouille allemande, DOSSERAY Sébastien, dit « Freddy », (qui parle Allemand), se redresse de derrière la haie, pour parlementer. Il est immédiatement abattu d’une rafale de mitraillette. Une fusillade nourrie éclate. LITTLE Henry, dit « Jim », est blessé d’une balle au mollet.

A cette attaque, les Allemands se réfugient, avec leurs prisonniers, dans la cour de la ferme VANDENSAVEL.

DERWA Arthur arrive sur les lieux et positionne son groupe entre la chapelle Saint-Bernard et le presbytère de Lamine.

Les Résistants tentent d’encercler la ferme. Le combat fait rage. 

Un des feldgendarmes parvient à s’échapper et à rejoindre le poste de guet aérien du Luftnachrichten Régiment 223, installé au moulin de Pousset. Les guetteurs appellent immédiatement, par radio, leur base de Saint-Trond – Brustem. Des troupes sont envoyées. Des véhicules de ce Régiment passent à Waremme, pour prendre les hommes de UNFRIED Paul.

Ces renforts arrivent de Waremme à Lamine, par Pousset. Ils prennent à revers les Résistants qui encerclent la ferme. A ce moment, une soixantaine de Résistants font face à  plus de 200 Allemands.

Un combat au corps à corps s’engage dans le cimetière. ROBYNS Zénon est gravement blessé. CHESTOPALOV Anatoli se réfugie dans l’église et préfère se donner la mort avec sa dernière balle. D’autres Résistants y perdent la vie:

  • DEHASQUE Jules, dit « Gangster », natif de Saint-Nicolas
  • BEAUPAIN Albert, natif de Stavelot
  • BELLEVILLE Jules, natf d’Anthisnes

STUPAKOV Pierre et (?), dit « le Vieux Georges », mettent un fusil-mitrailleur en batterie et arrosent les Allemands, qui tentent d’encercler les Résistants. Ils parviennent à les maintenir à distance.

Les combats durent jusqu’en fin de journée. Vers 17 heures, DERWA Arthur donne l’ordre de se replier vers Momalle et Fize-le-Marsal. Ce combat a entraîné de lourdes pertes de part et d’autre: DERWA Arthur, dit « Zoro », a perdu 6 de ses meilleurs soldats et plusieurs autres sont blessés; les pertes allemandes sont plus lourdes encore, 17 tués et une vingtaine de blessés. Les deux prisonniers n’ont pas été libérés.